3 Juillet 2017

Des liaisons satellitaires pour des trains connectés

Comment renforcer la sécurité, l’autonomie et le confort des trains tout en réduisant les coûts d’exploitation, et ce, dans un contexte de trafic croissant ? Telles sont les données de l’équation qui a réuni le CNES et la SNCF autour d’un accord signé en juin 2016. A l’horizon 2020, cet accord prévoit d’améliorer la surveillance des voies, la circulation et le contrôle des trains, les liaisons de communication train/réseau et l’accès à l’internet haut débit à bord. Le satellite apportera à ces secteurs de la précision, une couverture globale, un supplément de service et une optimisation des coûts.

Surveiller les infrastructures, gérer le trafic

Pour couvrir l’ensemble des domaines auxquels le satellite peut apporter une plus-value, le CNES et la SNCF ont mis en place des groupes de travail. En premier lieu, la SNCF a l’obligation légale de surveiller les abords de ses près de 40.000 km de voies. Ce qui signifie surveiller l’emprise de la végétation, mettre à jour les cartes du réseau, etc.  Des satellites comme Pléiades répondent à 95% de ces besoins.

Autre objet d’une surveillance précise, la « subsidence » des voies. Tout affaissement de terrain, si ténu soit-il, représente un risque extrême. Le recours à l’interférométrie radar lors d’un test, s’est révélé particulièrement concluant, fournissant une définition au millimètre près. « Des capteurs pourraient également enregistrer d'autres mesures, comme les vibrations et indiquer si la voie a bougé ou si les aiguillages commencent à s'user. Le champ des possibles est immense » explique Thierry Chapuis, responsable du projet au CNES. 

La gestion du trafic représente un autre chantier conséquent. Apprécier précisément le positionnement des trains se fait actuellement grâce à des capteurs positionnés le long des voies, environ tous les kilomètres. Non seulement l’entretien de ce dispositif représente un coût très élevé, mais il montre des limites : savoir sur quelle voie se trouve un train, détecter son  sens de circulation… L’approximation est encore grande et cela engendre des failles dans la sécurité. Dans toutes ces situations,  le satellite peut apporter des solutions  grâce au système de positionnement par satellite GNSS comme Galileo, combiné à des capteurs inertiels ou odométriques pour les tunnels ou les zones montagneuses où le signal passe mal. Les industriels fourmillent d’idées ingénieuses pour rendre le système GNSS robuste dans toutes les situations, comme pour les véhicules autonomes.

La dynamique du test

« Le choix d’une région test a dynamisé la coopération CNES-SNCF », déclare Frédéric Adragna, Chargé du développement des applications spatiales au CNES. Le Conseil régional d’Occitanie, qui souhaite diminuer le coût d’exploitation des trains régionaux, a lancé en 2016 le projet de recherche GéoFer, sur la ligne pilote Toulouse-Rodez. Ce projet, financé par la région Occitanie et le CNES, est mis en œuvre par le laboratoire toulousain Guide. GéoFer a pour objectifs de rendre les trains semi-autonomes, de tester des équipements de positionnement par satellite, de fluidifier le trafic, d’augmenter la sécurité et de faciliter l’entretien des voies. Cet essai régional a convaincu la SNCF d’en faire une ligne de référence au niveau national.

Deux autres chantiers se sont ouverts aux ingénieurs et aux industriels du spatial : les liaisons de télécommunication entre les trains et le réseau ferroviaire et l’internet haut débit à bord des trains. Si certaines lignes sont déjà équipées de la 3G ou de la 4G par voie terrestre, certaines liaisons gagneront en qualité et en continuité de service grâce à l’apport des satellites.

Un accord doit faire l’objet d’un accompagnement rigoureux si l’on veut qu’il se concrétise pleinement. C’est dans cet esprit que des rendez-vous réguliers réunissent Lionel Suchet, Directeur de l’Innovation, des Applications et de la Sciences au CNES et Pierre Izard, Directeur général délégué Système et Technologie de la SNCF, mais aussi annuels, entre Jean-Yves Le Gall, président du CNES et Guillaume Pépy, Président de la SNCF.


Le CNES tourné vers le développement économique

Le secteur spatial représente une source infinie de créativité. Ses retombées pour le développement nécessitaient d’orienter une partie des services du CNES vers l’aval, en réponse aux besoins économiques. Le 1er janvier 2016, le CNES se dotait d’une Direction de l’Innovation, des Applications et de la Science, la DIA.

Chargé de la partie Applications, Frédéric Adragna a fixé deux orientations à son équipe : l’accompagnement des grands acteurs potentiellement utilisateurs de solutions spatiales, comme la SNCF, et le soutien des industriels « fournisseurs » de services et d’applications spatiales, dont les start-up. Ces objectifs exigent non seulement un état de veille sur les besoins des usagers et les potentialités des industriels mais aussi une démarche pro-active, résolument tournée vers l’extérieur du cercle spatial habituel. « Nous adoptons une attitude de véritables VRP. Nous démarchons les grands secteurs économiques comme le transport, le tourisme, les assurances, etc. Nous leur présentons les solutions spatiales et les mettons en relation avec les industriels capables de leur fournir des solutions. Non seulement, le CNES les aide et les conseille, mais il assure un suivi et un accompagnement dans ce cheminement » explique Frédéric Adragna.

Le CNES a par ailleurs entrepris une réflexion sur une structure régionale capable d’agir au plus près des utilisateurs. Certaines de ces régions catalysent des solutions et des savoir-faire liés à leur spécificité. Ainsi, la Bretagne se concentre-t-elle davantage sur les applications liées à la mer, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur sur la sécurité, l’Occitanie sur l’agriculture et l’économie bleue (liée à l’exploitation des océans).